Armstrong, Karen. 2014. Fields of blood: religion and the history of violence. New York: Alfred A. Knopf.

Vaste programme que celui de Karen Armstrong (née 1944 en Angleterre et auteure de nombreux livres de religion comparée): raconter «la religion et l’histoire de la violence» (sous-titre de son livre), c’est-à-dire préciser le rôle de la religion dans une histoire mondiale de la violence. Vaste programme, qu’elle remplit avec ce «Fields of Blood», à la fois titre de l’ouvrage et résumé de ses 512 pages. Dans un impressionnant voyage dans le temps (du 3e millénaire avant l’ère commune jusqu’au 21e s.), et géographique (passant par la Mésopotamie, l’Inde, la Chine, le Proche et le Moyen-Orient, l’Europe et les Amériques), on y voit des champs imprégnés de sang et des religions qui contribuent à le faire couler.
Pour donner une petite idée de mes découvertes en lisant ce monumental ouvrage, j’ai choisi de réorganiser quelques éléments du livre pour répondre à 5 questions que je (me) pose. Mais je commence par reproduire ma citation préférée.

«But it also, perhaps, a flaw in the purely secular ideal that eliminates ”holiness“ from its politics-the conviction that some things or people must be ”set apart“ from our personal interest. The cultivation of that transcendence-be it God, Dao, Brahman, or Nirvana-had, as its best, helped people to appreciate human finitude. But if the nation becomes the absolute value (in religious terms, an ”idol“) there is no reason why we should not liquidate this who appear to threaten it.»

1. D’où vient la violence?

À cette question Armstrong répond en présentant les trois cerveaux de l’être humain. Un cerveau reptilien totalement égoïste qui nous pousse à manger à tout prix et à combattre toute menace. Un système limbique, propre aux mammifères, nous pousse à prendre soin ses plus jeunes et à former des alliances. Et un néo-cortex qui nous permet de réfléchir et de ne pas agir selon nos instincts primitifs. La violence correspond donc à un instinct primitif qu’il est possible de contrôler.

2. Les guerres sont-elles toutes dues à la religion?

«It is simply not true that ”religion“ is always aggressive»

Tant que la religion n’a pas été détachée des sphères sociales ou politiques, la religion a fait partie des motivations à partir en guerre. Mais quand (dans un processus qui commence en Occident avec la Réforme protestante au 16e s., qui devient plus ou moins effectif au 18e s. et auquel certaines religions résistent), la religion est privatisée et l’État sécularisé, les guerres continuent sans plus invoquer la religion. Ainsi les pires conflits, comme la guerre de Sécession ou les deux guerres mondiales n’ont pas eu de motivation religieuse, même si les combattant-e-s ont eu des sentiments religieux.

Ainsi «The French state had certainly not become more irenic after eliminating the Church from government.»

3. Est-ce que cela dédouane la religion?

Non, car toutes les grandes religions se sont appuyées sur un empire militaire; non, car la religion participe (le passé n’est malheureusement pas de mise) à la violence; non, car elle nourrit la violence en pratiquant des sacrifices, en suscitant des martyrs, en créant des conflits; non, car elle justifie la violence en lui donnant des motifs qu’elle juge juste: défendre les pauvres, lutter contre le mal, propager ses propres convictions; non, car elle légitime la violence en la prétendant accomplissement de la volonté de Dieu; non, car elle stimule les guerriers en promettant des récompenses éternelles.

4. La religion ne s’est-elle jamais opposée à la violence?

Si, car dans toutes les religions, des courants s’opposent à toute violence ou cherchent au moins à la limiter; si, car le monde indo-européen relègue les guerriers au deuxième rang, derrière les prêtres; si, car l’hindouisme recommande de méditer sur la mort plutôt que de l’infliger; si, car le bouddhisme enjoint de faire diminuer la souffrance; si, car la Chine valorise la modération, la tolérance, l’altruisme et la gentillesse; si, car le judaïsme relit ses anciens mythes nationalistes pour faire une place aux autres peuples; si, car le christianisme interdit de se battre entre le mercredi et le dimanche; si, car l’islam rend possible la cohabitation avec les juifs et les chrétiens; si, car les gouvernements se méfient souvent des religions qu’ils jugent trop bienveillante pour servir de principe de gouvernement.

5. Est-il possible que les religions évitent la violence?

Oui, si elles renoncent aux trois tentations impérialistes, celle qu’Armstrong mentionne à propos de l’empire romain.

«Romans made the three claims that characterize any successful imperial ideology: they had specially blessed by the gods; in their dualist vision, all other peoples were ”barbarians“ with whom it was impossible to deal on equal terms; and their missions was to bring the benefits of civilization and peace to the rest of the world»

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