Je vais en ville et je flâne au gré de mes humeurs. Je bade, je baguenaude et je remarque quelques grands bâtiments. Pas toujours beaux, mais toujours imposants: des banques, des grands magasins, la mairie ou l’hôtel de ville, un stade… Je regarde et je sais qui commande, qui donne le ton: l’argent, la politique, les affaires, le sport…
Et puis soudain des bâtiments qui me font réviser mon jugement. Tout n’est pas perdu; l’essentiel est préservé; la foi chrétienne reste présente, reste vivante. En témoignent ces temples protestants et ces églises catholiques. Certains diront qu’ils gaspillent de la place et des moyens, qu’ils sont sous utilisés et surdimensionnés. Moi je dirai plutôt qu’ils rééquilibrent la ville, qu’ils gardent de la place pour un luxe indispensable. Car ils sont là pour rappeler l’existence de Dieu, pour appeler au dialogue avec lui. Ils ont été les plus grands édifices; ils ont été rattrapés, ils ne le sont plus. Mais ils restent symboliques d’une présence chrétienne, au cœur de la ville (au milieu des villages, parfois au milieu de nulle-part), au cœur de la vie (au milieu de nous).
Tous les temples, toutes les églises sont construits selon deux dimensions, verticale et horizontale. Verticale: le clocher s’amincit, s’effile. Il pointe vers le ciel. Il nous montre Dieu. Il nous relie à lui. Il nous impose de garder ce lien. Horizontale: le bâtiment s’allonge, s’étend, s’élargit pour accueillir toute une communauté, femmes et hommes, jeunes et vieux. Il nous rend solidaires Temple et église réunissent des gens pour les mettre en relation avec Dieu.
Ce n’est qu’à l’intérieur que catholiques et protestants se distinguent. Beau symbole, d’abord l’unité (les moqueurs diront l’unité de façade!) ensuite la diversité. Et encore ! Églises et temples sont partagés de la même manière: un espace pour les officiants, un espace pour les participants. Mais au cœur d’une église catholique, là où tous les regards se dirigent, il y a le tabernacle — pour conserver les espèces consacrées — et l’autel — pour célébrer la messe; c’est qu’au cœur de la foi catholique, il y a le sacrifice de la messe. Au centre d’un temple protestant, là où tous les regards se dirigent, il y a la chaire — pour commenter la Bible; c’est qu’au cœur de la foi protestante, il y a la prédication de la Parole.
Bien-sûr, on pourra ergoter sur des détails. La hiérarchie marquée par la chaire du pasteur.e et la chaise de l’évêque contredirait-elle la notion de service? La grandeur et la décoration démentiraient-elles l’exigence de pauvreté? C’est possible, ce n’est pas ce qui m’intéresse aujourd’hui.
Je descends en ville et je flâne au gré de mes humeurs. Temples, églises me rappellent que Dieu existe, m’invite à entrer en relation avec lui.
- Sur les temples protestants, lire aussi dans Bonne Nouvelle, le mensuel de l’Église réformée évangélique du canton de Vaud: « Les réformés défendent leurs temples. » Laurence Villoz, 22 janvier 2016