Une communauté de chercheur.e.s (Ecclésiologie et évangélisation cinquième et dernier cours)

Résumé des épisodes précédents:

Le professeur Olivier Bauer a décidé de donner un cours de théologie vraiment pratique. Avec les pasteurs de Saint-Laurent Église, il a lancé un défi aux étudiant.e.s de Master: «Transformer les portes en seuils et les seuils en passage» (voir la présentation du cours).

La première semaine, les quatorze étudiant.e.s ont proposé à Saint-Laurent Église sept idées. Trois ont été retenues: créer un chemin qui conduise dans l’église et qui montre dehors ce qui se passe dedans; installer une communauté; organiser des combats de boxe pour symboliser les luttes spirituelles (voir le récit du premier cours).

La deuxième semaine, les étudiant.e.s ont commencé à transformer leur idée en projet. Dans un premier temps, ils ont cherché à savoir comment ils pouvaient rendre leur projet plus fidèle à l’Évangile, dans son interprétation réformée (voir le récit du deuxième cours).

La troisième semaine, les étudiant.e.s ont cherché à rendre leur projet plus efficace par rapport aux personnes qui fréquentent ce « lieu-phare » de l’Église évangélique réformée du canton de Vaud ou qui pourraient le fréquenter (voir le récit du troisième cours).

La quatrième semaine, les étudiant.e.s ont mis au point leur projet pour qu’il puisse convenir à Saint-Laurent Église tout en respectant leur propre théologie (voir le récit du quatrième cours).


Ma boîte aux lettres, jeudi 28 avril, 10h45.

Je reçois Bonne Nouvelle, le mensuel de l’Église évangélique réformée du canton de Vaud et j’y lis un bel article où Stéphanie Billeter relate notre cours: « Apprendre à franchir les seuils« .

UNIL, bâtiment Anthropole: mardi 3 mai 2016, 9h15.

Début du cours. La tâche des étudiant.e.s est simple. A 10h30, il leur faudra présenter le projet aux deux pasteurs de Saint-Laurent Eglise. Il n’est plus temps de réviser leur projet, mais d’en soigner la communication. Travail en groupe, mais aussi soucis personnels. C’est le dernier cours et les étudiant.e.s pensent à la validation du cours, ce qui engendre des questions (« Puis-je encore corriger mon travail? » « Quand allez-vous l’évaluer? ») et génère des démarches administratives. Bref, je ne chôme pas.

UNIL, bâtiment Anthropole: mardi 3 mai 2016, 10h30.

Les pasteurs Jean Chollet et Daniel Fatzer arrivent. Le temps d’un café et nous rejoignons la salle de cours. Les étudiant.e.s sont prêt à défendre leur projet. Il y du théâtre, de la musique; il y a du témoignage, des informations. Je ne peux pas vous faire vivre le temps de présentations, mais je peux vous donner à lire les résumés des trois projets. ce sont eux les héros de la journée (avec les étudiant.e.s qui les ont conçus, évidemment).

Le projet « Communauté »

Le projet « Ring »

Le projet « Chemin »

Les pasteurs réagissent. Avec leur regard pratique, fort de leurs expériences, heureuses et malheureuses. Ils abordent notamment la question de l’accueil radical. Il est souhaitable mais est-il possible? Et les nuisances d’un grand magasin qui a fait de l’arrière de l’église son quai de déchargement. J’avais rêvé qu’ils adopteraient au moins l’un des projets avec enthousiasme, et que, de concert avec les étudiant.e.s, ils le mettraient en œuvre le soir-même. Il faut me faire une raison, ce ne sera pas le cas. Mais au moins un élément émerge: la possibilité d’engager (et de payer) un ou deux étudiant.e.s pour renforcer l’équipe de Saint-Laurent Église et pour développer de nouveaux projets. Un tel modèle existe déjà (qui disait qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil?) dans l’Espace de la Fusterie, au sein de l’Église protestante de Genève. Un exemple à suivre?

Le groupe qui a travaillé sur la communauté termine sur un vibrant plaidoyer en faveur de la communauté. Ils/elles témoignent, chacun.e à son tour, de la manière dont ils/elles sont devenus une communauté de chercheur.e.s au fil du cours.

Avec des hauts et des bas;

Avec la nécessité de demander pardon et de pardonner;

Avec des charismes particuliers, avec une diversité enrichissante;

Avec un droit à la parole qu’il a parfois fallu revendiquer;

Avec des rythmes particuliers qu’il a fallu apprendre à respecter;

Avec des projets personnels qu’il a fallu intégrer.

UNIL, bâtiment Anthropole: mardi 3 mai 2016, 13h15.

Après un repas communautaire, je dispense mon dernier enseignement. Je transmets aux étudiant.e.s ma propre vision d’une Église, celle que j’ai développée comme professeur de théologie pratique, à partir de mon expérience de pasteur de l’Église protestante francophone de Washington, DC Centre (entre 2003 et 2006): Bauer, O. (2007). Vers une communauté d’individus. Le cas de l’Église protestante francophone de Washington, DC. In J. Richard & M. Dumais (éd.), Église et communauté (p. 59‑78). Montréal: Fides. En voici le résumé:

De 2003 à 2006, j’ai été le pasteur de l’Église protestante francophone de Washington, DC (EPFW). Fondée en 1927, l’EPFW est une Église complètement autonome sur les plans institutionnel, financier et théologique. Elle compte une centaine de foyers-membres et une centaine de foyers-amis: Européens, Africains et Américains. Deux forces opposées s’exercent dans l’EPFW: une force centrifuge qui sépare les individus et une force centripète qui les réunit en communauté. La force centripète comprend, entre autres, le protestantisme, le désir de se retrouver entre gens de la même origine, la volonté de continuer à utiliser la langue française, le goût pour les rencontres interculturelles et le climat religieux américain. La force centrifuge se compose notamment de la diversité des origines ethniques et religieuses, de la dispersion géographique, de la brièveté des séjours à Washington et de l’hyperactivité généralisée. Dans cet article, je présente la manière dont nous – pasteur, Conseil de paroisse, responsables-laïcs et communauté – avons essayé de rassembler des individus en une communauté et les références théologiques qui m’ont aidé dans mon travail.

UNIL, bureau 5059, mercredi 4 mai 2016, 17h56.

Fatigué mais heureux, je termine le dernier article sur mon cours « Ecclésiologie et évangélisation ». J’ai relevé mon défi, celui de publier chaque mercredi le compte-rendu du cours de la veille.

  • Merci aux pasteurs de Saint-Laurent Église d’avoir pris le risque de participer au projet.
  • Merci aux étudiant.e.s d’avoir accepté une forme inhabituelle d’enseignement.
  • Merci à Stéphnaie Billeter et à Bonne Nouvelle d’avoir suivi et médiatisé le cours.
  • Merci à vous d’avoir lu l’un, l’autre ou tous ces articles.

Un commentaire

  1. QUAND LA PAROLE NE DONNE PLUS DE FRUITS ?
    C’est un long commentaire… mais il résume mon cheminement de bien des années… Et si tout commençait par se donner le temps de nous écouter? Moi-toi-nous-l’Esprit?

    En 25 ans notre église a perdu la moitié de ses membres, je l’ai constaté de mes propres yeux. Malgré tous les efforts des chrétiens engagés de nos églises pour mettre l’église à jour, toujours plus de gens s’en détournent . Que veut dire ce signe en positif ? Un signe de l’Esprit de Dieu ?
    Que faire ?

    Que faire ? Peut-être que tout commence prendre conscience du sens de notre question : « à quelle manières de « faire » je me réfère ? ». Implicitement il peut s’agir de gérer nos activités extérieures. Avec un ordre : « Viens Seigneur, je t’écoute.. » Ou de créer une nouvelle offre qui rejoint les pratiques du supermarché des religions. Mais là nous le constatons depuis 25 ans , « plus ça change plus c’est la même chose.. le même résultat. » Une impasse.

    En voyant ce qui se passe, nous pouvons aussi changer notre manière de « faire ». Mais comment ? En mettant l’accent sur l’écoute des signes de l’Esprit, à l’intérieur comme à l’extérieur de nous. Par exemple entendre comment nous aussi, nous avons envie de quitter tel ou tel vécu ou pratique dans l’église, de sortir du ronron des lectures bibliques de type pharisien, ou du traintrain généré par les superstitions de telle tradition. Nous pouvons valider ce que l’Esprit nous dit en sourdine et en non verbal, notre envie de sortir de l’hypocrisie des formes extérieures, notre plaisir de cheminer ensemble, et décider de faire une plus grande place à l’Esprit, à l’intérieur.

    Nous pouvons revenir à la pratique de Jésus, Lui qui est « rempli du Saint Esprit », et qui nous en donne des exemples. Il commence son ministère par une série de signes non verbaux, des « miracles ». Il appelle au bonheur « Heureux êtes-vous »… Il ne cherche pas à créer une nouvelle religion. « Va, ta foi t’a sauvé …. Ne dis rien à personne… raconte seulement ce qui t’est arrivé à tes proches… Pour ta purification, va vers le prêtre…. » Si j’imagine Jésus rencontrant un adepte du bouddhisme (qui existait déjà depuis 4 siècles), je le vois écoutant et confirmant sa démarche « pour le bien de tous » (1 Cor 12).

    A Pentecôte, c’est de nouveau l’Esprit saint qui est au cœur de la nouvelle « église ». Une église qui est un simple lieu de rendez vous (comme son nom l’indique), pour écouter les signes extérieurs «d’un Esprit qui va ou Il veut et dont on ne sait pas d’où Il vient », et un Esprit intérieur qui « habite en vous » et produit pour chacun des dons différents. (1 Cor 12).

    Aujourd’hui je vois des signes concrets d’une « église » qui grandit : celle des petits groupes de méditation. Un lieu qui a mis l’écoute du silence au centre, pour laisser une place libre à la manifestation du Sens de l’Esprit en soi. Puis dans la lecture d’un court passage de la bible, le partage avec les autres, et la prise de conscience que dans des textes ultra connus, il y a un deuxième Sens, existentiel, autre que la Loi.

    Mais voilà qu’avec le mot « grandir », revient inconsciemment le sens du chiffre. Déjà on veut organiser cette expérience, qu’elle devienne un mouvement « mondial ». Alors que pour Jésus tout commençait par sa prière dans le désert, en silence, puis dans la joie de la rencontre inattendue sur son chemin, et enfin un Sens à son histoire qu’il remettait dans les mains de Dieu.

    L’avenir des églises ? Et si le Sens concret de ce qui se passe aujourd’hui, c’était de devenir des lieux ouverts, accueillants, peut-être désert, où chacun vient librement, en silence, comme dans un monastère, avec une invitation à laisser l’Esprit de Dieu parler en nous, personnellement?
    marcelvonnez@gmail.com

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