Dieu « qui voit dans le secret » porte-t-il: a) un regard bienveillant b) un regard déshumanisant?

Travaillant sur les rites célébrés à distance pendant les périodes de confinement, je me plonge dans un ancien article qui m’a été recommandé par le journaliste et théologien suisse Michel Kocher (lire sa brève présentation sur Réformés.ch) . En 1978, le professeur de théologie pratique Jean-Marc Chappuis (lire sa notice dans le Dictionnaire historique de la Suisse) réfléchissait sur la réalité de la présence de celles et ceux qui écoutent et/ou regardent le culte ou la messe à la radio ou à la télévision.

J’y lis ces lignes qui me semblent rester d’actualité, tant dans la constance du regard bienveillant de Dieu que dans le renforcement de la technologie omnivoyante et déshumanisante.

« La question n’est plus en effet aujourd’hui de savoir comment je puis me comporter devant le regard omniscient de Dieu. Cette question est deux fois dépassée. Elle est dépassée parce que l’Evangile nous a révélé que le regard de Dieu « qui voit dans le secret » est un regard aimant qui ne fait pas de nous des objets inertes et manipulables, mais des sujets actifs et responsables. Elle est dépassée parce que la technologie moderne a extériorisé le péril de l’omnivoyance. Le regard intérieur de Dieu est relayé par le regard extérieur de la société. À tout moment, je puis sans m’en douter être réduit à l’état d’objet, et d’objet « dépouillé et possédé » à quoi le regard d’autrui sur moi me condamne selon l’analyse sartrienne. » Jean-Marc Chappuis (1978). « La Téléprésence réelle », Positions Luthériennes, 26/2, page 161.


Je recommande très vivement la lecture de la petite fiction de Jean-Marc Chappuis Ecclesiastic Park, Histoire fantastique de William Bolomey, dernier pasteur chrétien, paru chez Labor et Fides en 1984 et réédité en 1998.

« Que peut-il se passer au XXIe siècle lorsque sociologues, ethnologues, psychoallergologues et autres savants découvrent parmi les anciennes cures métamorphosées en centres culturels une communauté chrétienne oubliée où le pasteur William Bolomey (2021-2102) continue fidèlement d’officier ? Tout simplement une cascade de conséquences plus imprévisibles les unes que les autres, qui éclairent d’un humour discret la fin du XXe siècle. »


Oui, les professeurs de théologie pratique peuvent avoir des visions prophétiques… Et pour ne pas laisser d’ambiguïté, je précise que le prophète annonce un avenir possible pour nous inciter à l’empêcher d’arriver.


Ajout à 16h40: Michel Kocher évoque la téléprésence réelle dans un entretien avec Joël Burri: « La radio permet de vivre un événement de la Parole », Réformés.ch, 13 mars 2020.

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