Crucifix

Du poisson dans le tabernacle (théologie fiction)

De temps en temps, j’aime faire de la théologie fiction. Ça me détend. Et c’est la seconde fois que je vais en faire sur l’Eucharistie (Lire mon polar théologique Sur la piste du bretzel).

Lors d’une visite dans la ville du Havre, en France, j’ai visité l’étrange et belle église Saint-Joseph (la découvrir sur le site de l’Unesco) et, dans la chapelle du Saint-Sacrement, au centre du mur du fond, j’ai vu ceci:

Le Havre, église Saint-Joseph, chapelle du Saint-Sacrement. (c) Patricia Bauer

En voyant le poisson sur le tabernacle, je me suis demandé ce qu’il y faisait. D’où ma…

Théologie fiction:

Pourquoi un poisson figure-t-il sur le tabernacle? Suivez bien ma logique:

  1. Le poisson sur le tabernacle est un symbole du Christ, puisque le terme grec Ichtus peut se lire comme l’acronyme de l’expression « Jésus Christ Fils de Dieu Sauveur ».
  2. Comme l’indique la lumière rouge de la présence perpétuelle, le tabernacle de la chapelle du Saint-Sacrement contient des hosties consacrées.
  3. La consécration du prêtre provoque la transsubstantiation de l’hostie, c’est à dire que sa substance change de « galette de farine de pur froment » en « corps du Christ ».
  4. C’est ce que souligne le crucifié qui surmonte le tabernacle.
  5. On a toujours postulé que ce corps du Christ était de la chair humaine, c’est-à-dire de la viande.
  6. Mais traditionnellement, l’Église catholique romaine interdit la consommation de viande certains jours de la semaine – en particulier le vendredi, jour de la crucifixion – et certains jours de l’année – en particulier pendant le carême, les 40 jours avant Pâques -.
  7. Pour que les catholiques puissent communier tous les jours de la semaine et tous les jours de l’année, la consécration du prêtre transsubstantifie bien l’hostie en « corps du Christ », mais sous la forme de chair de poisson.
  8. Et c’est ce qu’indique le poisson sur le tabernacle de la chapelle du Saint-Sacrement, dans l’église Saint-Joseph du Havre.

Note: « chair » au lieu de « chaire » corrigé deux fois le 12 août 2019 après le commentaire pertinent de Jean-Paul Guisan.

« Les crucifix sacrifiés sur l’autel de la laïcité » (Le Matin)

Félicitations au quotidien suisse Le Matin qui sait filer la métaphore!

Manchette du quotidien suisse Le Matin

Manchette du quotidien suisse Le Matin


Lire l’article du Matin sur le site de l’Église protestante de Genève (le titre de l’article est moins provocateur que la manchette):

Lire sur mon blogue, à propos des signes religieux (notament au Québec) et de leur possible interdiction:

La vraie histoire du crucifix de l’Assemblée nationale à Québec

Voici une mise en scène de ce que je pense être les meilleures caricatures québécoises ( Chapleau dans La Presse, Côté dans Le Soleil, Fleg dans Le Journal de Québec et YGreck pour Yahoo! Actualité) sur la présence ostentatoire d’un crucifix à l’Assemblée nationale à Québec (voir aussi mon article précédent: « Faut-il tirer une croix sur le crucifix?« ).

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Il était une fois un petit homme presque nu cloué depuis 1936 sur une croix en bois dans le Salon bleu de l’Assemblée nationale à Québec.

Crucifix-salon-bleu

En septembre 2013, les débats autour d’une « Charte des valeurs québécoises » réveillèrent le petit homme presque nu.

Fleg pour Yahoo! actualité

Fleg pour Yahoo! Actualité

Le petit homme presque nu essaya  de se faire discret.
Côté dans Le Soleil

Côté dans Le Soleil

Car certains imaginaient diverses solutions pour le rendre politiquement plus correct:

  • Il pourrait témoigner de l’égalité entre les femmes et les hommes…
Garnotte dans Le Devoir

Garnotte dans Le Devoir

  • Il pourrait refléter la diversité religieuse du Québec.
YGreck dans Le Journal de Québec

YGreck dans Le Journal de Québec

  • Il pourrait même être remplacé par la Première Ministre qui avait initié le débat.
Garnotte dans le Devoir

Garnotte dans le Devoir

Mais le petit homme presque nu avait tort de s’inquiéter. Tout cela ne le concernait pas.

Chapleau dans La Presse

Chapleau dans La Presse

On se demande toujours quelle est la raison d’ un tel traitement de faveur.

Chapleau dans La Presse

Chapleau dans La Presse

Peut-être parce qu’on aurait alors dû retirer toutes les croix!

Garnotte dans Le Devoir

Garnotte dans Le Devoir

Faut-il tirer une croix sur le crucifix?

C’est souvent le théologien qui interprète un quotidien qui ne lui a rien demandé, mais c’est parfois le quotidien qui devient théologique. Exemple patent ces derniers jours, quand la question récurrente du crucifix accroché à l’Assemblée nationale à Québec a brusquement resurgi dans le débat (lire « Laïcité – Benhabib veut débattre du crucifix à Québec » dans le Devoir du 15 août, mais aussi la « Liste des articles liés à ‘crucifix’ » sur le site Internet du Devoir).

Tout a été dit sur la nécessité de le conserver ou de le retirer. Tout ou presque tout! Car j’ai l’orgueil de croire que j’ai un argument original. Le gardant pour la fin, je commence par rappeler, brièvement et sommairement, les trois positions plus classiques.

Un argument culturel pour le maintien du crucifix

Certain-e-s pensent: « Les symboles catholiques ont non seulement marqué, mais aussi fabriqué l’identité des habitants de la Nouvelle France, puis des Canadiens, puis des Franco-Canadiens, puis des Québécois. Le crucifix dans l’Assemblée nationale du Québec témoigne de cette mémoire collective. Il faut le conserver. »

Un argument culturel contre le maintien du crucifix

Certain-e-s pensent: « Ce crucifix a une histoire. Il a été accroché au mur de l’Assemblée nationale en 1936, alors que Maurice Duplessis était premier ministre. S’il symbolisait à l’époque ce que le Québec voulait être, il ne représente plus ce que le Québec veut être aujourd’hui. Il est donc temps de le décrocher et de l’exposer au Musée de la civilisation. »

Un argument religieux pour le maintien du crucifix

Certain-e-s pensent: « Contrairement à ce que l’on prétend, le Québec n’a pas tellement changé. Il est encore très majoritairement et très profondément catholique et nous voulons qu’il le reste. Le crucifix témoigne de cet état de fait. Il incarne notre volonté. Il faut le conserver. »

Et un argument théologique contre le maintien du crucifix

Le théologien protestant que je suis espère que certain-e-s peuvent aussi penser: « Il n’est jamais bon que religion et politique s’acoquine. La démocratie ne s’accommode ni de la théocratie ni du césaro-papisme, mais seulement d’un État laïc. Il vaut mieux tenir les Églises à l’écart des lieux où s’exerce le pouvoir. Il est donc préférable de retirer ce crucifix. »