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« Les meilleures ventes en christianisme »: juin 2021

Dilemme, ce mois-ci, car le livre classé numéro 1 dans la rubrique « Christianisme » sur Amazon.fr n’est pas un livre. Et comme j’ai déjà traité des livres classés numéro 2 (voir mon article Livre # 4 le 1er mai 2021 : « La Bible de ma communion ») et 3 (voir mon article Livre # 1 le 1er octobre 2020 : « La Bible Segond 1910 »), je traite du livre classé numéro 4 :

  • À découvrir le 15 juin : Fabrice Hadhadj (2021). Être père avec saint Joseph. Petit guide de l’aventurier des temps post-modernes. Magnificat, 274 pages.

Rappel du projet :

Pour l’année universitaire 2020-2021, je me lance un défi : lire, présenter et commenter chaque 15 du mois le livre classé numéro 1 dans « Les meilleures ventes en christianisme » sur Amazon.fr. Je souhaite ainsi mieux comprendre ce qui du christianisme intéresse les lectrices et les lecteurs. J’ai choisi ce site de vente par correspondance en pensant que son volume de ventes garantit la représentativité du meilleur vendeur. Et je précise que je ne reçois rien, mais que je paye tous les livres que je n’achète pas forcément par correspondance.


Ouvrages déjà traités:

Livre # 3 le 1er avril 2021 : « Les travailleurs de l’ombre »

Nguepet, S. Les travailleurs de l’ombre : Ce qui est derrière le voile : une étape indispensable. Édition du Kindle. 121 pages.

Une citation percutante

« Je vais te donner une image afin de comprendre le poids des initiés. Disons ici que la Parole de Dieu est comme le texte qu’on donne aux acteurs d’un film ou d’une pièce de théâtre. Le réalisateur en chef et le metteur en scène, c’est le Saint-Esprit. Aussi merveilleux que soient le texte et les scénarios, si les acteurs ne connaissent que le texte et ne matérialisent pas les différentes actions qui sont dans le scénario, le film ou le théâtre ne ressemblera à rien et personne ne sera intéressé. Est-ce la faute du réalisateur ? Non. Je pense que ce qu’il fera est de changer les acteurs, car sans de bons acteurs, son œuvre n’a pas de valeur. Cela demande forcément beaucoup de préparation, de répétitions et autres. Et cela se passe forcément derrière le voile jusqu’à ce que tout soit parfait, avant de présenter le résultat au grand public. » p. 44

Le livre

Le livre traite d’un problème général, celui des « travailleurs de l’ombre », des personnes qui « effectuent un travail extraordinaire, mais qui peut être méconnu de tous, ou méprisé » (pp. 21-22). Mais il le fait dans une perspective spécifique aux Églises évangéliques, celle d’une envie de ces travailleurs de l’ombre d’en sortir, d’entrer dans la lumière, d’occuper des ministères reconnus, de « s’autoproclamer pasteurs, prophètes, évangéliste, docteurs ou apôtres » (p. 23). Et Syriac Nguepet va leur dire que c’est possible, mais que ce n’est pas forcément nécessaire, qu’ils ont besoin de temps et de reconnaissance. Il le fait en sept chapitres résumés dans des confessions de foi à répéter de « ta propre bouche ». « Ta bouche », car l’auteur s’adresse directement au lecteur. Au lecteur, car l’auteur ne prend jamais soin d’inclure les femmes.

  • Le chapitre 1 rappelle aux travailleurs de l’ombre qu’ils ont déjà leur récompense, dans le « milieu séculier » parce qu’ils contribuent « au bien-être et à l’avancement de l’humanité » (p. 28), dans le « milieu chrétien » parce que « Dieu voit dans le secret » (p. 30) ce qui est fait pour lui.
  • Le chapitre 2 distingue deux catégories parmi « les personnes travaillant en arrière-plan ». D’un côté « la foule », « la plus nombreuse en quantité, mais pas forcément en qualité » (p. 41) composée de « ceux qui ne font rien du tout », de « ceux qui sont dans la mine et qui se limitent à être de simples exécutants », de « ceux qui passent le temps à observer », de « ceux qui passent le temps à analyser » et de « ceux qui passent le temps à observer et à analyser ». De l’autre côté, « les initiés », « la catégorie des élites », des « personnes excellentes qui savent mieux agir que parler de la part de Dieu » (p. 43). Le bon choix est évidemment de rejoindre les initiés.
  • Le chapitre 3 décrit le temps de préparation, un temps « dans le secret », un temps pendant lequel « Dieu travaille pour toi derrière le voile » (pp. 50-51). Profitant de ce que Dieu garde en vie et protège, il faut méditer et mémoriser la Parole de Dieu, croître en sagesse, en stature et en grâce, se montre reconnaissant, fidèle et loyal.
  • Dans le chapitre 4, Syriac Nguepet mobilise sa propre expérience pour démontrer qu’il est possible de « vivre le surnaturel » alors même que l’on vit dans l’ombre. Dès l’âge de 12 ans, l’auteur a vécu « des choses extraordinaires ». Il a vu son autorité se manifester et ses « capacités intellectuelles s’accroître de façon spectaculaire » — « bien sûr, j’étais toujours premier de ma classe » (p. 71) — ; il a ressenti « un touché de Dieu dans [s] on esprit », a été « divinement averti » ; il est devenu responsable du club biblique de son école — « avec plus d’une centaine d’élèves sous ma responsabilité » (p. 71) — où il se faisait « des miracles, des prodiges et des guérisons », où il a même ressuscité un mort — « Alors j’ai eu une inspiration : celle de commander à son âme où qu’elle se trouvât de revenir dans son corps. Puis il est revenu en poussant un soupir effroyable ! » (p. 78)
  • Le chapitre 5 distingue deux types de personnes « derrière le voile » : les faibles, les craintifs et les lâches qui sont « une honte pour le Royaume de Dieu », car « certaines de ces personnes pensent être dans un temps de préparation, alors qu’il n’en est rien » (p. 85) et « les lionceaux en croissance » qui savent que la gloire est en gestation et la puissance en latence, qui attendent leur moment.
  • Le chapitre 6 dresse la liste des cinq « erreurs à éviter dans le processus de transformation » : l’oisiveté, la distraction, « juger ceux qui sont en première ligne », « contourner les épreuves et procrastiner » et « dresser sa tente », c’est-à-dire refuser ou renoncer de partir en mission quand le temps est venu.
  • Le chapitre 7 permet d’évaluer quand le temps de sortir de l’ombre est venu : quand, par la prière et grâce au Saint-Esprit, on a compris sa destinée et les erreurs à éviter, quand on a « commencé à vivre des expériences surnaturelles », quand on a « reçu un témoignage intérieur » et quand la loyauté, la fidélité et l’obéissance « à Dieu et en ses serviteurs ont été éprouvées et validées » (p. 109).

Syriac Nguepet conclut en rappelant deux données complémentaires, celui d’une vocation intérieure — « tu as un rôle à jouer dans le processus de ta transformation, afin d’être dans la volonté parfaite de Dieu » — qui a besoin d’une reconnaissance extérieure : « l’appel que nous ressentons au fond de nous, fût-il pressant, a besoin d’être confirmé » (pp. 118-119).

Ce qui peut séduire

J’imagine que les personnes qui travaillent dans l’ombre ont envie de lire un des rares ouvrages (à ma connaissance) qui évoque leur statut, leur vocation, leur travail, leur rôle dans une Église. C’est ce qu’indique le commentaire laissé par « Mouaha Marc » sur Amazon :

« Ce livre est un encouragement pour toutes les personnes qui pensent que tout ce qu’ils font n’est pas forcément reconnu. On peut être dans l’ombre tout en impactant notre environnement et apprendre tout en n’ayant aucune pression de se tromper puisque caché dans l’ombre. C’est une aide et une exhortation pour tous ceux qui pensent que Dieu ne voit pas ce que tu fais. Il vous voit et mieux il vous prépare en vous mettant à l’abri. J’ai dévoré ce livre tellement vite. À lire et à relire absolument ! »

Que le livre ne soit disponible qu’en ligne et sur un seul site accroît évidemment son succès sur ce site. Alors que les achats d’autres livres se répartissent dans plusieurs librairies ou sur plusieurs sites de commerce en ligne, tout·es celles et ceux qui achètent Les travailleurs de l’ombre doivent passer par Amazon.

Mon avis

(+) J’apprécie beaucoup l’idée de consacrer un ouvrage aux travailleurs de l’ombre, à celles et ceux que, dans les Églises réformées, nous appelons à tort les « laïques » alors que le principe protestant du sacerdoce universel veut justement dire que nous sommes chacune et chacun des pasteur·es, dans la nuit, dans l’ombre, dans la pénombre, dans le clair-obscur ou en pleine lumière. J’apprécie aussi la simplicité du livre. Avec ses types et ses listes, il a un côté pragmatique qui permet à chaque personne de comprendre ce qu’elle doit faire pour réaliser ce qu’elle croit que Dieu veut qu’elle fasse. J’ajoute qu’en filigrane, sous le texte, le livre m’a fait comprendre un problème que j’ignorais, celui de la répartition des fonctions dans les Églises évangéliques, celui d’une certaine frustration à ne pas pouvoir prendre sa place, à ne pas avoir le droit de remplir la tâche que l’on croit que Dieu attribue. D’où la tendance à créer son Église pour en être le pasteur. Cette place de chacune et chacun, bénévoles ou salariés, son importance et sa reconnaissance est certainement un défi qui vaut aussi, mais différemment dans des Églises réformées. Je l’ajoute à mon programme de recherche.

(–) J’apprécie moins la trop nette séparation entre les « pasteurs, prophètes, évangélistes, docteurs ou apôtres », les soi-disant travailleurs de la lumière, et le reste de la communauté, les soi-disant travailleurs de l’ombre. Je crois qu’évangéliquement, une telle distinction n’a pas lieu d’être. Car le travail dans l’ombre doit aussi faire aussi partie de la fonction pastorale. Dans ma théologie, le ou la pasteur·e n’est pas une superstar, mais un serviteur ou une servante. Par expérience, je sais qu’elle, il l’est souvent. Quant aux fonctions davantage mises en lumière — la prédication par exemple —, elles ne doivent pas être un monopole pastoral. Elles doivent être partagées en fonction des connaissances et des compétences. Ce que j’apprécie moins c’est cette idée que la réussite, que le succès vienne prouver la foi. Syriac Nguepet donne l’impression que « le surnaturel » ne se vit que dans les choses extraordinaires : les succès scolaires, professionnels, ecclésiaux, etc. Pourtant, on peut aussi ressentir la présence de Dieu dans une vie simple et même dans une vie pénible. Sa bienveillance aide à supporter le quotidien, y compris dans sa banalité, y compris dans sa difficulté. Ce que j’apprécie moins, c’est le regard un peu paternaliste qu’un pasteur en pleine lumière porte sur les travailleurs de l’ombre :

« Donc tous ceux qui travaillent dans le service d’aide sont aussi des personnes privilégiées, il ne faut donc pas précipiter le temps de passer à un autre niveau de responsabilité. » (p. 31)

Cela me fait penser aux arguments catholiques pour justifier le refus d’ordonner des femmes prêtres : elles n’ont pas besoin d’accéder à la prêtrise, puisque l’Église catholique leur offre de nombreuses manières de servir Dieu et les êtres humains. Il est vrai qu’il existe de nombreuses manières de réaliser sa vocation chrétienne, y compris dans l’ombre. Mais il est tout aussi vrai qu’il n’est pas évangélique de maintenir des monopoles ou de défendre des avantages.

L’auteur

Syriac Nguepet est un pasteur camerounais installé en France. Il exerce son ministère au sein d’une Église baptiste, ACER pour Association Chrétienne pour l’Évangélisation et le Réveil à Rennes. Sur sa page Facebook, il se présente comme « Pasteur — Auteur — Ingénieur Passionné des âmes, aide les travailleurs de l’ombre à créer un impact ». Sa rubrique « À propos » sur Amazon.fr indique qu’il est « marié à Liliane depuis 2012 et [qu’] ils ont 4 enfants ». Dans son ouvrage, il indique qu’il est ingénieur-statisticien et qu’il travaille dans le domaine bancaire.

La maison d’édition

Le livre est une auto-édition, disponible uniquement sur Amazon, broché et au format Kindle.


Ouvrages déjà traités:

« Les meilleures ventes en christianisme »: avril 2021

Certains livres sont des succès sûrs, puisque j’ai déjà traité des numéros 1 et 2 dans la rubrique « Christianisme » sur Amazon.fr au premier avril 2021: la Bible Segond (voir mon article Livre # 1 le 1er octobre 2020 : « La Bible Segond 1910 ») et Conversations avec Dieu (voir mon article Livre # 3 le 1er février 2021 : « Conversations avec Dieu » par Neale Donald Walsh). Je traite donc du livre classé numéro 3 !

  • À découvrir le 15 avril : Nguepet, S. (2021). Les travailleurs de l’ombre. Ce qui est derrière le voile : Une étape indispensable.

Rappel du projet :

Pour l’année universitaire 2020-2021, je me lance un défi : lire, présenter et commenter chaque 15 du mois le livre classé numéro 1 dans « Les meilleures ventes en christianisme » sur Amazon.fr. Je souhaite ainsi mieux comprendre ce qui du christianisme intéresse les lectrices et les lecteurs. J’ai choisi ce site de vente par correspondance en pensant que son volume de ventes garantit la représentativité du meilleur vendeur. Et je précise que je ne reçois rien, mais que je paye tous les livres que je n’achète pas forcément par correspondance.


Ouvrages déjà traités:

Livre # 5 le 1er mars 2021 : « Carnet d’étude de la Bible »

Mars 2021

Pour différentes raisons (voir mon article « Les meilleures ventes en christianisme » : mars 2021), je traite ce mois-ci du livre numéro 5 :

Carnet d’étude de la Bible : Un livret pour y inscrire les remarques que t’inspire l’étude de la Bible, y noter des versets bibliques ou y rédiger tes pensées. (2019). Inspired To Grace.

Une citation percutante

Une image valant sept mots — ceux qui se répètent page après page —, voici comment les éditions Inspired to Grace mettent scène l’utilisation de l’utilisation de leur carnet :

Le livre

Ce n’est pas un livre, mais un carnet de 53 pages comportant chacune sur le recto et le verso une case pour écrire une « date » et trois grands encadrés lignés : sept lignes pour recopier un « verset de la bible », onze lignes pour écrire des « réflexions » et sept lignes pour rédiger ses « prières ».

Ce qui peut séduire

Pour un prix raisonnable, vous achetez un beau carnet — le graphisme et la texture de la couverture sont particulièrement soignés — qui doit vous donner l’envie de noter et donc de conserver des versets bibliques qui vous semblent importants et ce qu’ils vous inspirent. Même si le carnet n’est pas directement conçu pour ça, la suggestion de l’utiliser à la manière d’un collimage ou d’un créacollage (les équivalents français de scrapbooking) permet sans doute d’allonger le temps passé avec les versets bibliques — surtout si en même temps on sirote un café et grignote des macarons ! — et d’augmenter le désir de relire ses notes.

La version en tête des ventes est une version générale qui s’avère être la version féminine. Car les éditions Inspired to Grace proposent aussi un « Carnet d’étude de la Bible pour hommes » qui révèle leur vision de la masculinité : sobre, sérieuse, droite et anguleuse comme la police de caractère et qui s’intéresse à la marine plutôt qu’aux fleurs !

Mon avis

(+) J’aime cette idée de faire de la Bible un objet du quotidien, de donner envie de la lire, de la réfléchir et de la méditer. J’aime aussi l’idée d’utiliser la mode du journal et du coloriage pour l’appliquer à la lecture de la Bible ; profiter de ce qui marche n’est pas un péché ! J’aime encore cette touche créative : créer un bel objet donne envie de relire ses notes. J’aime toujours le côté pratique du carnet, une page par verset et quelques lignes de réflexion et de prière. J’aime enfin ce que suggèrent les encadrés : la Bible est à réfléchir, elle est source de prière.

(–) J’aime un peu moins l’idée de découper la Bible en fine tranche d’un seul verset. S’il y a bien des versets qui peuvent « parler » hors de tout contexte, les lire dans le mouvement du passage, du chapitre ou du livre biblique permet de mieux en comprendre le sens.

L’auteur·e

C’est moi, c’est vous ! Elle ou il est donc forcément génial·e !

La maison d’édition

Sur son site Internet (en anglais seulement, donc je traduis), Inspired to Grace se présente comme « une maison chrétienne d’édition qui se passionne à répandre la parole du Christ à travers de magnifiques livres de coloriage, d’objet de piété, des journaux de prière et d’étude biblique. » Elle crée et vend des carnets, des agendas ou des affiches à colorier qui permettent de lire et de décorer des versets bibliques présélectionnés ou de noter et méditer ceux que l’on choisit. Ses produits ne sont disponibles que sur Amazon.


Ouvrages déjà traités:

Livre # 3 le 1er février 2021 : « Conversations avec Dieu » par Neale Donald Walsh

Février 2021

La Bible Segond et le Missel des dimanches étant respectivement numéros 1 et 2 le 1er février 2021 (voir mes articles Livre # 1 le premier octobre 2020 : « La Bible Segond 1910 » et Livre # 1 le 1er décembre 2020 : « Missel des dimanches 2021 »), je traite du numéro 3 :

Walsh, N. D. (2003). Conversations avec Dieu — Un dialogue hors du commun (M. Saint-Germain, Trad. ; Vol. 1). J’ai Lu. 252 pages

Une citation percutante

« Ce livre traite de la plupart des questions, sinon toutes, que nous nous sommes posées sur la vie et l’amour, le but et la fonction, les gens et les relations, le bien et le mal, la culpabilité et le péché, le pardon et la rédemption, la voie qui mène à Dieu et le chemin de l’enfer… de tout. Il aborde directement le sexe, le pouvoir, l’argent, les enfants, le mariage, le divorce, le travail, la santé, l’au-delà, le pré-maintenant… tout. Il explore la guerre et la paix, la connaissance et l’ignorance, le fait de donner et le fait de recevoir, la joie et la peine. Il envisage le concret et l’abstrait, le visible et l’invisible, la vérité et l’absence de vérité. » (p.10)

Le livre

Dans son introduction, l’auteur décrit la naissance de son livre en cinq temps (p.9-12) :

  1. « Ce livre s’est manifesté à moi. »
  2. « Ma vie serait probablement plus simple si j’avais gardé tout cela pour moi. »
  3. « Malgré les inconvénients que ce live pourrait me causer […], il ne m’est plus possible d’arrêter ce processus. »
  4. « Il fallait le publier car c’est un cadeau merveilleux. »
  5. « Ce livre est “le dernier mot de Dieu à propos de tout.” »

Dans le livre, un « je » pose des questions à Dieu qui lui répond. Ce qui donne un long dialogue (le livre et le premier d’une trilogie à laquelle s’est ajouté un tome 4) entre « je » et un Dieu aussi désigné comme Dieu le Père ou le Créateur, mais aussi la Divinité ou la Déité, la Source, le Grand Invisible, l’Énergie elle-même, « Tout Ce Qui Est et Tout Ce Qui N’est Pas ».

Le livre est long, parfois compliqué, mais le cœur du message est simple. Renforcement positif, développement personnel : nous sommes une part de Dieu ; notre potentiel est illimité ; nous l’avons oublié ; nous devons nous le rappeler ; nous devons choisir entre la peur et l’amour ; tout ce qui nous arrive résulte de nos choix.

Arrivé à ce point, on peut se demander pourquoi Amazon.fr l’a placé dans la catégorie « Christianisme ». Je note d’abord que le site de vente en livre l’inclut aussi dans la catégorie « Canalisation du Nouvel Âge » et même « Cuisine & Vins », ce qui montre la rigueur des choix. Mais plus fondamentalement, l’auteur fonde son livre sur une culture largement chrétienne, qu’il vient corriger et contester. Il mentionne des concepts théologiques : la crucifixion, le péché, l’enfer, etc. ; il évoque des textes bibliques : « Bénis soient ceux qui sont centrés sur le Soi, car ils connaîtront Dieu » (cf. évangile attribué à Matthieu chapitre 5) ou « Tu peux imaginer quel genre d’énergie créatrice se déchaîne chaque fois que deux personnes ou plus se rassemblent en Mon nom » (cf. évangile attribué à Matthieu chapitre 18,20) ; il relit les dix commandements en les transformant en dix engagements : « 5. Tu sauras que tu as trouvé Dieu quand tu verras que tu ne tues pas (c’est-à-dire : tuer volontairement, sans raison) » (p. 122); mais si le christianisme l’inspire, l’auteur ne se montre jamais sectaire quant aux références religieuses qu’il mobilise ; s’il fait de nombreuses mentions de Jésus, il convoque aussi le Bouddha, Moïse ou Krishna. Et toujours, il conteste et corrige ce qui a été dit, fait, pensé, enseigné, comme en témoigne ce dialogue :

— « Mais ma vérité à propos de Dieu vient de Toi.

— Qui a dit cela ?

— D’autres.

— Quels autres ?

— Des leaders. Des pasteurs. Des rabbins. Des prêtres. Des livres. La Bible, pour l’amour du ciel !

– Ce ne sont pas des sources autorisées. » (p. 21)

Ce qui peut séduire

Si un livre vous donne les clefs pour être riche, en bonne santé et avoir du sexe heureux, allez-vous le lire ?

Mon avis

(—) « Qu’allez-vous pouvoir faire avec ce charabia Nouvel Âge ? » m’a demandé le libraire chez qui j’achetais le livre. Aujourd’hui, je lui répondrai: « Franchement pas grand-chose ! » Je n’aime pas la forme — l’auteur devrait prendre ses responsabilités et assumer ce qu’il veut transmettre — , je n’aime pas le fond : croire en Dieu ne garantit pas la prospérité. De plus, le message est immunisé, c’est-à-dire qu’il rend impossible toute discussion Essayez donc de contester une telle affirmation : j’ai voulu tout ce qui m’arrive et même si je n’ai pas voulu ce qui m’arrive, je l’ai quand même voulu ! Paradoxalement, pour un livre qui vise le renforcement positif, il prend le risque de culpabiliser et de frustrer. Car si tout est possible et qu’il me revient de me créer ce possible, alors à qui dois-je en vouloir, si j’échoue ? À moi, à moi-même, à moi seulement, à moi tout seul ! Je ressens dans ma chaire l’effet pervers d’un tel discours : la vie est difficile, mais en plus, c’est de ma faute !

(+) Je reconnais cependant deux mérites à ce livre. J’ai apprécié certaines de ses reformulations, par exemple quand l’auteur évoque l’Esprit comme désincarnation de Dieu (voir mon article L’Esprit comme désincarnation d’un Dieu incarné). Sa lecture m’a obligé à repasser ma théologie au peigne fin, en me demandant si elle résistait aux critiques formulées par Neale Donald Walsh. Car je l’admets: même ce livre peut me transmettre la parole de Dieu.

L’auteur

La lecture de l’ouvrage donne quelques informations sur l’auteur : il doit être chrétien, puisque Dieu évoque « ta religion chrétienne » (p.71). Deux pages de questions (p.93-94) disent beaucoup de ses centres d’intérêt. Un peu injustement, j’en sélectionne quelques-unes : « Que faut-il que je fasse […] pour obtenir un minimum de succès ? » « Pourquoi est-ce qu’on dirait que je ne peux jamais attirer suffisamment d’argent dans ma vie ? » « Comment puis-je résoudre certains des problèmes de santé que j’affronte ? » « Si je choisis de faire un travail de guérison dans le monde (l’œuvre de Dieu), puis-je faire cela et atteindre l’abondance financière ? » « Pourquoi as-tu fait du sexe une expérience humaine si bonne, si spectaculaire, si puissante, si nous devons nous en abstenir autant que possible ? ».

Sa page Wikipédia précise qu’il est né le 10 septembre 1943 à Milwaukee, dans le Wisconsin et « qu’il est principalement connu pour ses livres dans lesquels il transcrit ses “conversations” avec Dieu survenues à la suite d’un accident de voiture qui provoqua une crise majeure dans sa vie ». Elle ajoute que sa trilogie Conversations avec Dieu s’est vendue à 7 millions d’exemplaires dans le monde.

Le site « Conversations with God » qui est une véritable entreprise spirituelle vend les produits de Neale Donald Walsh : des livres, des applis, des DVD, des cours à distance, des enregistrements audio, des cartes de vœux, des retraites, un programme de mentorat. Mais il y a aussi un onglet « free content », « contenu gratuit ».

Le traducteur Michel Saint-Germain est un journaliste et écrivain québécois (vois sa fiche sur LinkedIn).

La maison d’édition

Le livre est publié aux éditions J’ai Lu. Selon leur site, leur ambition est « d’offrir au plus grand nombre un panorama des différentes littératures actuelles ». Il est paru dans la collection Aventure secrète autoproclamée « LA collection historique d’ésotérisme en France ».


Ouvrages déjà présentés:

Corrigé le 15 février à 17h40.

« Les meilleures ventes en christianisme »: février 2021

Incroyable, mais vrai, les deux premiers livres dans la catégorie « Christianisme » sur Amazon.fr au mois de février sont deux livres qui ont déjà été numéro 1 (La Bible Segond et Le Missel des dimanches). Ce mois-ci, je traiterai donc du livre numéro 3, encore un livre de conversation avec une puissance supérieure: après Jésus, une conversation avec Dieu!

  • À découvrir le 15 février : Neale Donald Walsh (traduction de Michel Saint-Germain) (2003). Conversations avec Dieu – un dialogue hors du commun (tome 1). J’ai lu: 256 pages.

Rappel du projet :

Pour l’année universitaire 2020-2021, je me lance un défi : lire, présenter et commenter chaque 15 du mois le livre classé numéro 1 dans « Les meilleures ventes en christianisme » sur Amazon.fr. Je souhaite ainsi mieux comprendre ce qui du christianisme intéresse les lectrices et les lecteurs. J’ai choisi ce site de vente par correspondance en pensant que son volume de ventes garantit la représentativité du meilleur vendeur. Et je précise que je ne reçois rien, mais que je paye tous les livres que je n’achète pas forcément par correspondance.