Février 2021
La Bible Segond et le Missel des dimanches étant respectivement numéros 1 et 2 le 1er février 2021 (voir mes articles Livre # 1 le premier octobre 2020 : « La Bible Segond 1910 » et Livre # 1 le 1er décembre 2020 : « Missel des dimanches 2021 »), je traite du numéro 3 :
Walsh, N. D. (2003). Conversations avec Dieu — Un dialogue hors du commun (M. Saint-Germain, Trad. ; Vol. 1). J’ai Lu. 252 pages
Une citation percutante
« Ce livre traite de la plupart des questions, sinon toutes, que nous nous sommes posées sur la vie et l’amour, le but et la fonction, les gens et les relations, le bien et le mal, la culpabilité et le péché, le pardon et la rédemption, la voie qui mène à Dieu et le chemin de l’enfer… de tout. Il aborde directement le sexe, le pouvoir, l’argent, les enfants, le mariage, le divorce, le travail, la santé, l’au-delà, le pré-maintenant… tout. Il explore la guerre et la paix, la connaissance et l’ignorance, le fait de donner et le fait de recevoir, la joie et la peine. Il envisage le concret et l’abstrait, le visible et l’invisible, la vérité et l’absence de vérité. » (p.10)
Le livre
Dans son introduction, l’auteur décrit la naissance de son livre en cinq temps (p.9-12) :
- « Ce livre s’est manifesté à moi. »
- « Ma vie serait probablement plus simple si j’avais gardé tout cela pour moi. »
- « Malgré les inconvénients que ce live pourrait me causer […], il ne m’est plus possible d’arrêter ce processus. »
- « Il fallait le publier car c’est un cadeau merveilleux. »
- « Ce livre est “le dernier mot de Dieu à propos de tout.” »
Dans le livre, un « je » pose des questions à Dieu qui lui répond. Ce qui donne un long dialogue (le livre et le premier d’une trilogie à laquelle s’est ajouté un tome 4) entre « je » et un Dieu aussi désigné comme Dieu le Père ou le Créateur, mais aussi la Divinité ou la Déité, la Source, le Grand Invisible, l’Énergie elle-même, « Tout Ce Qui Est et Tout Ce Qui N’est Pas ».
Le livre est long, parfois compliqué, mais le cœur du message est simple. Renforcement positif, développement personnel : nous sommes une part de Dieu ; notre potentiel est illimité ; nous l’avons oublié ; nous devons nous le rappeler ; nous devons choisir entre la peur et l’amour ; tout ce qui nous arrive résulte de nos choix.
Arrivé à ce point, on peut se demander pourquoi Amazon.fr l’a placé dans la catégorie « Christianisme ». Je note d’abord que le site de vente en livre l’inclut aussi dans la catégorie « Canalisation du Nouvel Âge » et même « Cuisine & Vins », ce qui montre la rigueur des choix. Mais plus fondamentalement, l’auteur fonde son livre sur une culture largement chrétienne, qu’il vient corriger et contester. Il mentionne des concepts théologiques : la crucifixion, le péché, l’enfer, etc. ; il évoque des textes bibliques : « Bénis soient ceux qui sont centrés sur le Soi, car ils connaîtront Dieu » (cf. évangile attribué à Matthieu chapitre 5) ou « Tu peux imaginer quel genre d’énergie créatrice se déchaîne chaque fois que deux personnes ou plus se rassemblent en Mon nom » (cf. évangile attribué à Matthieu chapitre 18,20) ; il relit les dix commandements en les transformant en dix engagements : « 5. Tu sauras que tu as trouvé Dieu quand tu verras que tu ne tues pas (c’est-à-dire : tuer volontairement, sans raison) » (p. 122); mais si le christianisme l’inspire, l’auteur ne se montre jamais sectaire quant aux références religieuses qu’il mobilise ; s’il fait de nombreuses mentions de Jésus, il convoque aussi le Bouddha, Moïse ou Krishna. Et toujours, il conteste et corrige ce qui a été dit, fait, pensé, enseigné, comme en témoigne ce dialogue :
— « Mais ma vérité à propos de Dieu vient de Toi.
— Qui a dit cela ?
— D’autres.
— Quels autres ?
— Des leaders. Des pasteurs. Des rabbins. Des prêtres. Des livres. La Bible, pour l’amour du ciel !
– Ce ne sont pas des sources autorisées. » (p. 21)
Ce qui peut séduire
Si un livre vous donne les clefs pour être riche, en bonne santé et avoir du sexe heureux, allez-vous le lire ?
Mon avis
(—) « Qu’allez-vous pouvoir faire avec ce charabia Nouvel Âge ? » m’a demandé le libraire chez qui j’achetais le livre. Aujourd’hui, je lui répondrai: « Franchement pas grand-chose ! » Je n’aime pas la forme — l’auteur devrait prendre ses responsabilités et assumer ce qu’il veut transmettre — , je n’aime pas le fond : croire en Dieu ne garantit pas la prospérité. De plus, le message est immunisé, c’est-à-dire qu’il rend impossible toute discussion Essayez donc de contester une telle affirmation : j’ai voulu tout ce qui m’arrive et même si je n’ai pas voulu ce qui m’arrive, je l’ai quand même voulu ! Paradoxalement, pour un livre qui vise le renforcement positif, il prend le risque de culpabiliser et de frustrer. Car si tout est possible et qu’il me revient de me créer ce possible, alors à qui dois-je en vouloir, si j’échoue ? À moi, à moi-même, à moi seulement, à moi tout seul ! Je ressens dans ma chaire l’effet pervers d’un tel discours : la vie est difficile, mais en plus, c’est de ma faute !
(+) Je reconnais cependant deux mérites à ce livre. J’ai apprécié certaines de ses reformulations, par exemple quand l’auteur évoque l’Esprit comme désincarnation de Dieu (voir mon article L’Esprit comme désincarnation d’un Dieu incarné). Sa lecture m’a obligé à repasser ma théologie au peigne fin, en me demandant si elle résistait aux critiques formulées par Neale Donald Walsh. Car je l’admets: même ce livre peut me transmettre la parole de Dieu.
L’auteur
La lecture de l’ouvrage donne quelques informations sur l’auteur : il doit être chrétien, puisque Dieu évoque « ta religion chrétienne » (p.71). Deux pages de questions (p.93-94) disent beaucoup de ses centres d’intérêt. Un peu injustement, j’en sélectionne quelques-unes : « Que faut-il que je fasse […] pour obtenir un minimum de succès ? » « Pourquoi est-ce qu’on dirait que je ne peux jamais attirer suffisamment d’argent dans ma vie ? » « Comment puis-je résoudre certains des problèmes de santé que j’affronte ? » « Si je choisis de faire un travail de guérison dans le monde (l’œuvre de Dieu), puis-je faire cela et atteindre l’abondance financière ? » « Pourquoi as-tu fait du sexe une expérience humaine si bonne, si spectaculaire, si puissante, si nous devons nous en abstenir autant que possible ? ».
Sa page Wikipédia précise qu’il est né le 10 septembre 1943 à Milwaukee, dans le Wisconsin et « qu’il est principalement connu pour ses livres dans lesquels il transcrit ses “conversations” avec Dieu survenues à la suite d’un accident de voiture qui provoqua une crise majeure dans sa vie ». Elle ajoute que sa trilogie Conversations avec Dieu s’est vendue à 7 millions d’exemplaires dans le monde.
Le site « Conversations with God » qui est une véritable entreprise spirituelle vend les produits de Neale Donald Walsh : des livres, des applis, des DVD, des cours à distance, des enregistrements audio, des cartes de vœux, des retraites, un programme de mentorat. Mais il y a aussi un onglet « free content », « contenu gratuit ».
Le traducteur Michel Saint-Germain est un journaliste et écrivain québécois (vois sa fiche sur LinkedIn).
La maison d’édition
Le livre est publié aux éditions J’ai Lu. Selon leur site, leur ambition est « d’offrir au plus grand nombre un panorama des différentes littératures actuelles ». Il est paru dans la collection Aventure secrète autoproclamée « LA collection historique d’ésotérisme en France ».
Ouvrages déjà présentés:
Corrigé le 15 février à 17h40.
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