« Luther, réveille-toi, ils sont (re)devenus fous! »

Ce dimanche, l’archevêque catholique-romain de Québec inaugurera une Année Sainte, dont l’ouverture de la Porte Sainte dans la Basilique-Cathédrale Notre-Dame à Québec sera le symbole. Elle permettra aux catholiques-romains d’obtenir des indulgences. Je me permets de rappeler brièvement ce qu’elles sont.

Selon l’Église catholique-romaine, la vie après la mort peut se dérouler dans trois lieux: le paradis, l’enfer et le purgatoire. Au terme de chaque existence, Dieu dresse un bilan des bonnes et des mauvaises actions. Un solde créditeur (très positif en bonnes actions) permet d’accéder au paradis. Un solde débiteur (très négatif en bonnes actions) envoie directement en enfer. Le défunt dans une situation intermédiaire passe un certain temps au purgatoire où il purge sa peine avant d’accéder au paradis. Les saint-e-s sont des personnes exceptionnelles dont le solde est très largement créditeur (leurs bonnes actions dépassent largement leurs éventuelles mauvaises actions). Après leur mort, leurs bonnes actions inutilisées sont transférées dans un fond de placement géré par l’Église catholique-romaine. Elle en distribue des parts à ses fidèles, en échange d’actes de dévotion,  pour qu’ils investissent dans leur vie après leur mort. Acheter des indulgences leur permet d’augmenter leur capital de bonnes actions et de réduire d’autant le temps qu’ils devront passer au purgatoire.

En 1517, un moine allemand nommé Martin Luther s’était insurgé contre la vente des indulgences qui servait à financer la construction de la basilique Saint-Pierre à Rome. Il croyait pouvoir réformer l’Église catholique-romaine, elle l’a excommunié. 500 plus tard, on croyait les indulgences disparues, l’Église catholique-romaine les distribue toujours.

« Luther, réveille-toi, ils sont (re)devenus fous! »

À lire pour en savoir plus:

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Reprise de cet article

  • Une version légèrement différente a été publié sous forme de lettre dans Le Devoir du 9 décembre 2013, rubrique Éthique et religion (lire la lettre)

5 commentaires

  1. Passablement d’assemblées historiques et non étatiques se mettent à demander ‘la dîme’ en affirmant faussement qu’elles seraient ‘bibliques’ …

    Certains traducteurs de la bible (NBS) ont trouvé judicieux de revenir au grec pour certains mots mais pas pour d’autres ( par exemple : le verbe ressuscité, le nom ‘humain-personne’) … par contre, pour bien d’autres mots, ils ont gardé ‘la base latine’.
    Personne ne connait les critères qui les ont amener à choisir de ‘revenir au grec’ pour ressusciter mais pas pour bien d’autres passages qui mériteraient tout autant de ‘revenir au grec’ …

    D’autres assemblées se calquent sur les entreprises, elles développent des ‘stratégies de managment’ pour dégager des … bénéfices …

    Les agnostiques se réclament soudain du protestantisme … ils ne croient ni à la mort propitiatoire de Christ ni à sa résurection et pourtant ils enseignent … bien qu’ils ne partagent certainement pas le pain et le vin avec d’autres, ne souhaitant pas proclamer les effet dans nos vies de cette mort-résurrection ??? Idem pour le baptême …
    … ceux qui croient s’empressent généralement de le proclamer ! 🙂 (Cette dernière phrase avec douceur, agape, et un zeste d’espièglerie … le sel de la grâce …)

    La société secrète catholique qui revient aux indulgences semble être ‘dans l’ordre des apostasies actuelles’ prévues par les apôtres depuis ‘toujours’ …

  2. En réaction au texte «Acheter son ciel» du prof. Olivier Bauer («Le Devoir» du 9 sept.)
    Dans une lettre publiée dans «Le Devoir» de ce 9 décembre, le professeur Olivier Bauer «réduit» l’événement de l’ouverture de la porte sainte, hier, à la basilique-cathédrale de Québec, à l’aspect bien marginal (et bien sûr contestable) des «indulgences». Cela m’attriste profondément.
    Je reconnais volontiers qu’il soit difficile, de nos jours, de justifier et de comprendre le sens de cette pratique des indulgences dans l’Église catholique. Et je sais également le rôle funeste que ces dernières ont pu jouer au moment du schisme de l’Église d’Occident.
    Mais l’événement que commémore cette ouverture d’une porte sainte, dans le cadre du 350e anniversaire de la paroisse Notre-Dame de Québec, est loin de se résumer à cette affaire des indulgences. Le symbole d’une «porte sainte», que les croyants sont invités à franchir dans une démarche spirituelle, relève typiquement de cette tradition catholique qui a toujours mis un accent sur les «gestes et signes extérieurs» (j’ai envie de dire «ostentatoires») que sont les pèlerinages, les sacrements et sacramentaux, la piété populaire, etc. pour «médiatiser» le salut et «incarner» la volonté de conversion et de communion des croyants. Pour sa part, la Réforme protestante a voulu (avec raison, à cause des dérives et des excès d’un certain catholicisme) critiquer ces «dévotions» et «pratiques extérieures» afin de mettre plutôt l’accent sur l’intériorité et le rapport plus «immédiat» du croyant avec Dieu. Il me semble que ces deux «sensibilités théologiques» (qui prennent de multiples formes dans l’histoire et les différentes confessions chrétiennes) sont légitimes et, qu’aujourd’hui, sur ces matières, nous pouvons et devons dépasser les anathèmes réciproques (relevant d’une autre époque), entre Églises sœurs.
    Ce qui me chagrine le plus, toutefois, dans le texte du professeur Bauer, c’est la caricature absolument vexatoire qu’il brosse de cette pratique des indulgences. Son texte la présente comme quelque chose de totalement ridicule (et donc de parfaitement méprisable), sans aucune «charité herméneutique» envers une croyance (bien sûr contestée et contestable) de la tradition catholique qui, néanmoins, trouve vraisemblablement encore «un certain sens» auprès de certaines personnes – que le texte du théologien de l’Université de Montréal risque malheureusement de faire passer pour de parfaits abrutis!
    Que dirait mon frère protestant si un théologien catholique se permettait, par exemple, à l’occasion d’un événement festif ou commémoratif de sa propre communauté de foi, de publier dans le journal une caricature aussi «bébête» de la croyance protestante en la «prédestination» (elle aussi fort discutable et ambiguë sur le plan théologique et historique)? Voilà qui serait jugé, à juste titre, assez «baveux» et peu courtois!
    En outre, ce traitement expéditif et plutôt cavalier accordé aux indulgences (une croyance que je trouve personnellement peu signifiante et pertinente) me fait penser à celui que plusieurs accordent, ces jours-ci, au voile porté par certaines femmes musulmanes : des spécialistes auto-proclamés s’arrogent le droit, dans les médias, et en 3 coups de cuillère à pot, de «décréter» péremptoirement ce qu’est la signification de telles pratiques ou de tels symboles dans la conscience ou la tradition spirituelle des autres. Cela, trop souvent, en réduisant cette signification à ce qu’il y a de plus simpliste et de plus caricaturale afin de mieux ridiculiser et discréditer ces pratiques ou ces symboles. Pourquoi tant d’invectives et de condescendance à l’égard des croyances religieuses des uns et des autres, dans ce Québec de 2013? Denise Filiatrault disait hier des femmes portant le voile par choix «qu’elles sont toutes des folles!» Olivier Bauer écrit ce matin, en parlant des catholiques: «Luther, réveilles-toi, ils sont redevenus fous!» Merci! N’en jeter plus s.v.p.! La cour est pleine!
    Le port d’un voile, pas davantage que le pèlerinage à une porte sainte et la doctrine des indulgences ou de la prédestination ne devraient être réduits à des choses stupides et ridicules. La critique de ces pratiques ou convictions est certainement légitime, mais il me semble qu’elle ne devrait pas commencer par le mépris. Pour certains croyants, ces «pratiques» ou «convictions» ont une signification (souvent d’ailleurs très personnelle et autonome) qui n’est pas réductible aux aberrations historiques, «magistérielles» ou contextuelles dans lesquelles un regard hautain et une interprétation unilatérale peuvent vouloir les enfermer. D’ailleurs, le professeur Bauer doit savoir qu’autant la doctrine des «indulgences» dans le catholicisme que celle de la «prédestination» dans le protestantisme ont évolué et se sont profondément transformées depuis leurs origines. Je conçois très bien que la pratique des indulgences soit critiquable et que ce ne soit pas la chose la plus «glorieuse» du catholicisme! Mais je trouve bien malvenu que mon frère protestant la caricature de la sorte dans le journal et, se faisant, fasse ombrage à tout le reste d’un événement festif et historique ayant une grande signification pour plusieurs membres de la communauté catholique. Le 350e anniversaire de fondation de Notre-Dame de Québec (première paroisse catholique en Amérique du Nord) mérite plus que cette malheureuse dérision de la part d’un membre d’une Église sœur – surtout dans l’actuel contexte québécois où le mépris à l’égard des croyances, traditions et signes religieux des «autres» semble être devenu notre sport national!
    Marco Veilleux
    9 déc. 2013

    http://www.ledevoir.com/societe/ethique-et-religion/394693/acheter-son-ciel

  3. Homélie de l’Archevêque de Québec, ouverture de la Porte sainte:

    Il rappelle que «nous sommes tous des fils et des filles d’immigrants..» (!!!). Il évoque «l’élargissement de notre communion aux autochtones… et autres immigrants». Il mentionne «les structures de péché» à combattre. Il tend la main aux autres confessions chrétiennes et aux non-croyants… Rien sur les indulgences!

    http://www.ecdq.tv/fr/videos/14ea0d5b0cf49525d1866cb1e95ada5d

    1. Cher Monsieur,
      Je vous remercie de ces précisions. Ces paroles me paraissent, à moi aussi de bonnes paroles.
      Pour mémoire, je rappelle que c’est le même Gérald Cyprien Lacroix, archevêque de Québec, qui, pour l’année de la foi, signait un décret:

      « Par lequel il désign[ait] les lieux où il [était] possible d’obtenir l’indulgence plénière »: La Basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec. La Basilique Sainte-Anne-de-Beaupré. Le Sanctuaire Notre-Dame d’Etchemin. Le Sanctuaire Sainte-Thérèse-de-l’Enfant-Jésus. Le Sanctuaire de la Paix (église du Très-Saint-Sacrement). Le Sanctuaire du Sacré-Coeur (Missionnaires du Sacré-Coeur, Vieux-Québec). »

      Et que le site Internet de l’église catholique de Québec présente toujours ce que sont les indulgences:

      « Étant donné qu’il s’agit avant tout de développer au plus haut degré — pour autant que possible sur cette terre — la sainteté de vie et d’obtenir ainsi le plus haut degré de pureté d’âme, le grand don des Indulgences que l’Église, en vertu du pouvoir qui lui a été conféré par le Christ, offre à tous ceux qui, conformément aux dispositions adéquates, remplissent les conditions spéciales pour les recevoir, sera très utile. » http://beta.ecdq.org/anneedelafoiaquebec/annee-de-la-foi-indulgence-pleniere/

      Maintenant, libre à chacun-e de se faire une opinion et de croire comme il/elle veut croire!

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